JE CONNAIS GENS DE TOUTES SORTES

JE CONNAIS GENS DE TOUTES SORTES, de Philippe LABRO, Gallimard, 2002

 

 

Philippe Labro a déjà été rencontré sur ce site (voir Rouart 2) et j’ai dit combien j’appréciais sa participation à la « société de connivence ». J’aurais donc manqué ce livre si la photo de Malraux parmi d’autres sur la couverture de sa réédition en collection de poche n’avait attiré mon attention sur un étal de librairie. Je l’ai feuilleté, j’ai lu le chapitre sur Malraux (c’est très court), et l’ai reposé : consternant !

Il s’agit de la réédition d’un article de Vogue de mai 1979, dans lequel notre malrauxlâtre raconte un entretien que lui a accordé son idole à Verrières en février 1972. Le ton est celui de l’admiration sans bornes pour son physique (« la tête penchée »), la couleur de son costume croisé (le noir), sa maison (silence, grand calme, goût, chaleur, marron sombre et vert sapin, dalles blanches et tapis épais), son attitude (« Malraux a le sens le plus profond de l’égalité de l’autre, le respect de tout interlocuteur »), son amour des chats (« Malraux, sur les chats, était époustouflant, intarissable. Au vrai, il l’était sur tout »)...

Quant au contenu de l’entretien : « Le récit de son dîner avec Nixon, la prospective sur la rencontre [Mao Tsé-toung-Nixon], les répercussions sur le Japon, l’URSS, les fulgurances sur le Pacifique, de Gaulle, Kissinger, Staline, restent proprement stupéfiantes, lorsque je les relirai dix ans plus tard, en vue d’écrire cet article pour Vogue ».

On sait en effet aujourd’hui combien Malraux, sur tous ces sujets était stupéfiant d’ignorance et de bêtise.

S’y ajoutent les légendes habituelles : « il enlève, au premier tour et à l’unanimité, le prix Goncourt… », « son mépris de l’argent », « sur un plateau de la Metro-Goldwyn-Mayer à Hollywood où Marlene Dietrich, en déshabillé transparent, tournait une scène d’amour… le jeune Français paralysa littéralement, et involontairement, le tournage de ladite scène par sa seule présence et son seul charisme », « … il a repris Strasbourg pour de vrai ».

 

Labro s’est donné une chance de faire amende honorable sur ses égarements passés en ajoutant aujourd’hui un avenant à ses articles. Deux pages titrées « Relecture. Savoir monter d’un cran ». Il persiste et signe, au contraire.

 

Monsieur Labro, vous et vos semblables avez abusé des générations de lecteurs avec cet imposteur. Grand bien vous fasse !

 

 

© Jacques Haussy, juillet 2003