MALRAUX DEFENSEUR DU PATRIMOINE ? (suite bis)

 
 

Céline a mentionné l'Ambigu - plus exactement la petite place qui faisait face au théâtre - dans Mort à Crédit. Voici un extrait, accompagné des dessins faits par Jacques Tardi pour illustrer le texte (pp. 120-121, 195, 196-197, Futuropolis-Gallimard, 1991).

 
Trois et quatre fois les samedis je m'appuyais les livraisons de la Place des Vosges, rue Royale, au pas gymnastique encore ! La peine en ce temps-là on en parlait pas. C'est en somme que beaucoup plus tard qu'on a commencé à se rendre compte que c'était chiant d'être travailleurs. On avait seulement des indices. Vers sept heures du soir, en plein été, il faisait pas frais sur le « Poissonnière », quand je remontais de mes performances. Je me souviens qu'à la Wallace, qu'est sous les arbres à l'Ambigu, on s'en jetait deux ou trois timbales, on faisait même pour ça la queue... On se retapait un petit moment, assis sur les marches du théâtre. Y avait des traînards de partout, qui recherchaient encore leur souffle... C'était un perchoir parfait pour les mégottiers, les « sandwiches », les « barbottins » en faction, les bookmakers à la traîne, les petits placeurs, et les « pilons », les sans-emploi de toute la frime, des quantités, des douzaines... On parlait des difficultés, des petits « paris » qu'on pouvait prendre... des chevaux à « placer » et des nouvelles du vélodrome... On se repassait la « Patrie » pour les courses et les annonces... Déjà l’air c’était la « Matchiche », le refrain à la mode… Tout le monde le sifflait en se dandinant autour du kiosque… En attendant son tour pour pisser… Et puis on repiquait dans le carrefour.



décembre 2006